Killing An Arab / Killing Another

[Le Chat Botté]

Le Chat Botté vous souhaite le bonsoir.

[Coralie Bellule]

[Cryptx]

Dernière édition par Le Chat Botté le Mar Mar 25, 2008 1:24 am; édité 1 fois

Il a au moins compris un truc ce soir...

[aka dale cooper]

hum hum....
"l'étranger".... et la mort de sa mère...qu'en faites vous?
d'ailleurs, si l'on souhaite jouer avec les mots, il tue un "algérien" et non un "arabe"...
et comme en ce temps, l'"Algérie" était un département "français"... donc... "killing a french".

je pense qu'il se tue lui même... pas uniquement par cet acte... et puis camus était le contraire d'un raciste. C'était un visionnaire, comme beaucoup de personnes de grand talent.
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fort comme la mort

[Soledad]

+1 Señor Aka dale
"l'homme révolté " est culte aussi pour moi...

et je suis sourde aussi...


Niko c'était avec le mag Nous deux ? pardon.....
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never surrender

[Coralie Bellule]

@ Niko et Sole
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Sister Of No Mercy

[Coralie Bellule]

L’étrangère ( Journal intime 2006 / Tribute to Albert Camus: so, en français… )
Current mood: indescribable
Category: Blogging

Aujourd'hui, ma télécommande est morte. Ou peut être hier, je ne sais pas.
J'ai appuyé sur tous les boutons. J'ai changé les piles. Mais elle ne fonctionnait plus.
J'ai reçu une réponse laconique de Noos par le chat d'assistance Internet :
« Télécommande décédée. Echange en boutique Noos demain. Sincères condoléances ».

Cela ne veut rien dire. C'était peut être hier.

La boutique Noos est à Jaurès, à quarante minutes de là. Je prendrai l'autobus à 18h et j'arriverai avant la fermeture. J'ai demandé à mon psy de remettre notre rendez vous et il ne pouvait pas refuser avec une excuse pareille. Mais il n'avait pas l'air content. Je lui ai même dit : « - Ce n'est pas de ma faute ». Il n'a pas répondu. J'ai pensé alors que je n'aurais pas du lui dire ça. En somme, je n'avais pas à m'excuser. C'était plutôt à lui de me présenter ses condoléances. Il le ferait sans doute la prochaine fois.

J'ai pris l'autobus à 18h. Il faisait très lourd. J'avais mangé devant la télé, comme d'habitude. Mais l'écran était noir, en deuil, et mes chats avaient beaucoup de peine pour moi. Quand je suis partie, ils m'ont accompagnée à la porte. J'avais préparé mon lecteur MP3 et un livre.

J'ai couru pour ne pas manquer l'autobus.
Je me suis assise au milieu, tout près de la porte de sortie. Je me suis retrouvée contre une grosse fille qui mangeait des hamburgers. J'ai augmenté le volume de mon baladeur, pour ne plus sentir l'odeur. Des hamburgers, pas de la fille.

L'autobus est resté arrêté très longtemps à la station des Buttes Chaumont. Ce n'était pas grave : je lisais.

A travers la paroi vitrée, un mouvement a accroché mon regard. Juste devant moi, le dos d'un jeune, et face à lui, un homme trapu, le t-shirt bien tiré dans le pantalon, qui hurlait sans bruit.

Il avait la quarantaine. Son visage était déformé par la colère et je ne pouvais lire que du mépris dans les mots silencieux.

Cela me contrariait. J'ai regardé l'heure sur mon téléphone portable. Il était déjà 18h35. Je risquais d'être en retard s'ils ne cessaient pas de se disputer.

Le jeune gesticulait. J'ai vu son visage de profil et il criait aussi. Puis il a reculé jusqu'à presque me toucher. J'ai eu un mouvement pour protéger mon livre. Mais il a heurté la paroi vitrée. J'aurais bien aimé monter encore le son parce qu'ils allaient crier de plus en plus fort, seulement mon lecteur était déjà au maximum.

Le chauffeur était debout et une femme blonde essayait de retenir l'homme. Je me suis dit qu'il pouvait être policier, et puis j'ai changé d'avis. Il ressemblait plutôt à un employé de bureau, un postier ou un comptable qui aurait rêvé de devenir policier. Il parlait comme s'il essayait de cracher. Tout le bus regardait le jeune et l'homme, et la femme blonde était maintenant accrochée au bras de l'homme. Il bombait le torse et écartait les bras. J'entendais à travers la musique quelque chose à propos de la porte du bus, restée ouverte.

« - Tu fais chier tout le monde, espèce de petit con, on te dit de pas bloquer la porte alors tu bloques pas la porte. »

Le jeune faisait de grands gestes menaçants.

« - Ne me parles pas comme ça, connard, moi je fais chier le monde, mais je fais ce que je veux, ta gueule ».

L'homme a repoussé la femme blonde et il a frappé le jeune sur la poitrine, comme pour le pousser. Le jeune lui a mis un coup de poing. Il se sont jetés l'un sur l'autre et les jambes du jeune se sont écrasées contre mes jambes.

C'est là que j'ai remarqué le deuxième jeune. Quand il s'est jeté sur l'homme. Cela faisait une sorte de mêlée à trois. Un tas très très agité.

Tout le monde poussait de grands cris maintenant, alors j'ai éteint mon lecteur MP3.

J'étais très ennuyée. La fille à coté de moi tenait toujours son hamburger à deux mains mais elle ne mangeait plus. Derrière moi, une dame qui sentait très fort le parfum s'était levée et criait :

« - Mais faites quelque chose, arrêtez les »

Mais elle restait derrière moi et elle ne faisait pas quelque chose et elle ne les arrêtait pas.

Moi je ne savais pas s'il fallait faire quelque chose, et quoi. Cela ressemblait à un combat de chiens. Je n'avais pas de seau d'eau.

Tout le monde avait reculé. Les gens s'étaient levés pour descendre ou aller à l'avant. Il aurait été plus prudent de me mettre à distance aussi évidemment.

D'un autre coté, tant qu'à me lever, autant intervenir. Vraiment faire quelque chose ou vraiment ne rien faire.

J'aurais sans doute pu les séparer en les poussant très fort chacun d'un coté. C'est moins efficace qu'un seau d'eau. Mais je savais que cela marche sur les humains. Je l'avais fait souvent. Avant.

Seulement ils avaient vraiment l'air de vouloir se battre.

Alors je ne bougeais pas du tout. Pas d'un centimètre.

Pour se battre plus commodément ils se sont déportés sur le trottoir, à l'extérieur. L'homme frappait dans leur ventre. Les deux jeunes frappaient son visage, le bras levé très haut, dans un drôle de mouvement arrondi. On aurait dit un mouvement de Tai-chi. En beaucoup plus énergique, bien sur. C'était très original.

Ils se sont séparés brutalement. Il y avait divers objets par terre, dans le bus et sur le trottoir.

Le soleil éclaboussait un énorme motif rouge sur le t-shirt de l'homme. Je n'avais pas remarqué ce motif pourtant très vif. C'est seulement quand j'ai vu qu'il avait aussi du rouge sur le visage que cela m'a frappée. C'était du sang.

Un des jeunes est remonté dans le bus pour ramasser des choses par terre. L'homme avait l'air sonné. Il bombait toujours le torse mais en titubant. Cela avait l'air fini.

L'autre jeune a ramassé des lunettes sur le trottoir. Il s'est approché de l'homme calmement en lui tendant à bout de bras. L'homme a semblé reprendre ses esprits un instant. Il s'est jeté sur le jeune pour le refrapper. Ils sont remontés dans le bus en se mettant des coups.

Une goutte de sang a éclaboussé ma jambe nue. C'était chaud et humide. Il y en avait aussi sur ma chaussure. C'était assez joli, ce rouge sur fond noir.

La dame parfumée derrière moi criait encore :

« - Mais faites quelque chose, bandes de lâches, mais qu'est ce que vous avez dans le pantalon. »

C'est là que j'ai compris qu'elle s'adressait en réalité aux hommes du bus. Comme si le fait d'avoir un chromosome Y obligeait à se jeter dans le premier combat de chiens. C'était amusant.

Finalement, ils sont redescendus sur le trottoir. Après quelques coups, ils se sont séparés à nouveau. La dame parfumée criait que la police allait venir.

Presque tout le monde était déjà descendu du bus, d'abord pour se protéger ou pour regarder la bagarre, et ensuite pour donner leur avis. Les deux jeunes étaient partis maintenant. Mais l'autobus ne partait toujours pas. J'allais être très en retard.

Les gens entouraient l'homme au t-shirt à motif rouge. Ils avaient l'air de le plaindre et de le féliciter en même temps.

La dame parfumée derrière moi disait que c'étaient vraiment tous des lâches, et que comme d'habitude personne ne bougeait.

Elle s'en prenait à deux jeunes hommes assis à coté de moi, de l'autre coté de l'allée centrale. Elle se retenait visiblement de les traiter de pédés. Sûrement parce qu'ils l'étaient manifestement. Ils auraient pu mal le prendre.

Un des jeunes se défendait, celui qui semblait être son petit ami regardait par la fenêtre de l'autre coté. Il a dit :

« - Mais qu'est ce que vous voulez qu'on fasse ! Moi aussi, j'aimerai bien que ces jeunes ne se croient pas tout permis, mais ils sont toujours plus nombreux. »

La dame parfumée a répondu :

« - Mais avec tout ce qui se passe en plus, c'était politique, son acte, et si tout le monde avait bougé, vous auriez été plus nombreux. On ne peut pas laisser ces sauvages faire la loi, quand même, vous vous rendez compte ou va la France ? Cet homme est un héros ! »

Et elle a essayé de me prendre à témoin. Moi, car malheureusement, nous n'étions vraiment plus nombreux dans cet autobus.

J'ai haussé les épaules.

Elle insistait, alors j'ai juste dit :

« - C'est lui qui a frappé le premier. »

Elle a bredouillé :

« - Mais enfin, vous ne pouvez pas être de leur coté, tout de même ! »

Non. Je ne faisais que constater. Mais je n'étais d'aucun coté. Ni pour, ni contre. Bien au contraire.

« - Je ne suis dans aucun camp. »

La dame parfumée a semblé très scandalisée. Elle est sortie du bus pour aller plaindre l'homme qui avait porté le premier coup.
Il n'y avait presque plus personne dans le bus. Je m'ennuyais.

Les taches par terre étaient très jolies, alors j'ai pris des photos avec mon téléphone portable. Je ne l'avais jamais fait. Mais c'est très facile. J'ai trouvé dommage de ne pas y avoir pensé pendant qu'ils se battaient.

J'ai vu sur l'écran du téléphone qu'il était 19h05. La boutique Noos était fermée.

J'ai décidé de rentrer chez moi à pieds.




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Sister Of No Mercy

[Nikola]

voilà un résumé de l'histoire ci dessus pour les féneants
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"Le poète qui dort dehors et qui dans les bras de Morphée rêve des mots d'un mort célèbre et mords ses lèvres." S.D.

[SeatNumber]

[Coralie Bellule]

[ken le survivant]

« - Mais faites quelque chose, arrêtez les »

Mais elle restait derrière moi et elle ne faisait pas quelque chose et elle ne les arrêtait pas.

Personne ne fais jamais rien dans ces cas la!
Si je dis ça c'est qu'une fois je n'ai pas hésité à descendre (avec le chien, certes ) car une femme se faisait tabasser par deux mecs.Résultat: on a tous attendu la police.J'étais fier de moi car j'ai aidé une femme, elle m'a remercié.
Y'a rien d'extraordinaire dans ce que j'ai fais, le problème c'est que beaucoup ne bouge pas.

[Nikola]

[YOKO ONO]

J'avoue que j'ai pas tout lu (merci Nikola )
Les photos sont étonnantes.

Une bonne illustration de la couleur du "sang oxygéné" Vs sang coagulé ou encore sang menstruel. (cf. notre conversation de l'autre jour)

[Coralie Bellule]

C'est le Camus Style qui donne le fond - et savoir que la premiere phrase de SON roman est :
Aujourd'hui, maman est morte. Ou peut etre hier, je ne sais pas.

Autre chose : elle a repensé a ce texte parce que... Aujourd'hui, Noos lui a envoyé une telecommande qui fonctionne (ca fait plus d'un an et demi, quand meme)

@Ignacio : où ça, une conversation sur le sang ? Ca l'interesse. Et elle est vexee, il se lit mieux que du bayon, ce texte.
Sinon, ce n'est jamais que de l'art moderne trash urbain - cad , sa toute premiere photo de telephone portable basse def.
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Sister Of No Mercy

[ken le survivant]

personne ne bouge si je comprends bien?! bravo les curistes!!

[aka dale cooper]

j'ai lu... et j'ai lu aussi.
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fort comme la mort

[Cryptx]

Je suis fan de ton style Coralie, aussi bien ici que dans ton dernier ouvrage, une tranche de vie tout à fait étonnante que cette étrangere. Je rejoint Niko sur la vibration...

[Soledad]

Oh merci Coralie suis afficionada, me souviens d'un travail sur Hopper à l'Aleph où mes peut-être ou peut-être pas avait enchanté des auteurs...directement piqué et inconsciemment à Camus..je viens de m'en rendre compte trop forte toi!!!

pour les photos trés distanciées j'aurais aimé une marre de sang mais je dois être gore....
hier soir tard sur les Mots de Minuit (j'ai pas maté cinéma frisson) un auteur dont j'ai pas retenu le nom parlait du fait qu'il a toujours un appareil photo pour prendre le réel....intéressant...
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never surrender

[Coralie Bellule]

Contente d'apprendre que tu décroches de ciné frisson, courage..
Tu as raison, je n'y avais jamais pensé mais l'auteur developpe surement une obsession de "capturer le reel", pas seulement des photos (j'ai des caisses de photos a la cave, mais je me suis calmée) mais aussi toute forme de "trace", genre ticket de train, fleurs sechees, faux ongle arraché pendant un tournage, dessin sur un bout de nappe de restau... Et deja petite, je m'immobilisais subitement pour prendre des "photos mentales" (mais qui incluaient la vue et les sensations, odeurs, etc) - le premier dont je me rapelle nettement, c'est face a la mer en grece, mon intention etait vraiment de fixer cette realite la.
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Sister Of No Mercy

[ken le survivant]